Les sacrifiées

Judy Garland voulait sa dose

Son magicien d’Oz

Des amphés pour tenir des heures

Sous l’feu croisé des projecteurs

Amy Winehouse mourant d’alcool

Est une idole

On danse sur sa dépression

Sur son suicide, jolie chanson

           

REF / On les a suicidées pour l’art

Pour l’usine à beauté

Qu’il faudrait décidément saboter

Janis Joplin est héroïne

Elle s’assassine

Elle se sent seule sous son boa

De plumes prunes et purpurines

Nina Simone n’a pas le temps

D’être une enfant

Elle travaille son jeu éternel

Quand les gosses jouent dans le soleil

REF / On les a suicidées pour l’art

Pour l’usine à beauté

Qu’il faudrait décidément saboter

Des suicidées d’la société

Peuplent les arènes d’la télé

Les lions vont-ils les dévorer ?

Electrocutée dans un orage de flashs, piégée à poil dans son patio, la petite vedette vogue sur des eaux houleuses, où le mépris de soi flirte avec l’adulation des autres, qui ne la convainc jamais. Jamais non plus elle n’avait rêvé du rapt du photographe cannibale, qui la fauche au plus bas, presque suicidée déjà. Vautour vicelard, voleur d’âmes en partance qui guette avec sa gâchette de Kodak Reflex la chute, l’échec, le crack, la mort que la foule attend maintenant.

Foule furie qui l’a aimée et qui la hue désormais, parce qu’elle ne tient pas debout, mais qu’il a payé. C’est morte qu’il l’aimera plus, sa petite malade qui ne peut plus chanter, qui ne peut plus jouer le jeu, qu’on devrait aliter.

Drôle que personne ne semble penser à arrêter la machine et à soigner la gosse, qui prévient pourtant bien dans ses textes au subutex qu’elle veut caner, claquer, expirer, exhaler son dernier chant.

Mais imagine tout le blé qui s’envolerait, on s’est déjà engagés avec le père, on ne peut plus reculer, et tout arrêter. Et puis on veut le spectacle, l’arène, être ceux qui l’auront vue clamser sur scène, pour hurler de soulagement :

A MORT ! A MORT ! A MORT !