Le joueur et l'affranchi

Je suis descendu en ville, dans la ville Celle-là même où clignotent perpétuelles Les milliers d'ampoules qui étourdissent Et m'aveuglent la gueule à coups de pelle Dans la chaleur écrasante de cet été sans fin Je m'avance en cadence au devant des portes tambour De ce casino immense qui depuis trop longtemps Me suce le sang, m'enivre, me met le grappin Je cavale dans les allées le regard altéré Par la danse animale et psychédélique De cette ruche cannibale d'une armée d'humains Au milieu du vacarme, je remarque irascible Cette table de craps qui m'aspire dans ses filets Comme autant de charmes où plus rien n'est vrai Le joueur s'enlise, l'affranchi se complait L'un domine, l'autre s'incline Le flambeur dérive, le caïd se repaît L'un culmine, l'autre s'abîme Ce sont mes mains qui s'élancent et propulsent les dés Mes sens qui s'érodent, s'écrasent à chaque jet Tout à coup le temps ralentit, je parais hésiter Mes paupières sont lourdes, mes pensées saccadées Mon acuité devient sourde, ma tête saccagée Au centre de la foule, je le vois progresser Un James Burke de service Le caïd affranchi Il est ma proie, mon cancer De ses griffes, je me libère Mon calibre s'invite avec une soif de trophée Ce soir la pègre s'effrite et gagne un macchabée Les secondes cavalent sur les parois du tunnel Une fin glaciale dans les griffes du cartel Le joueur s'enlise, l'affranchi se complait L'un domine, l'autre s'incline Le flambeur dérive, le caïd se repaît L'un culmine, l'autre s'abîme L'un culmine, l'autre s'abîme